Texte d’Alexandre St-Pierre
Spirit and Flesh: Sturm und Drang
L’auteur de cet article est Benjamin Penny Ph.D ., un spécialiste des mouvements religieux et spirituels dont le Qigong et le Falun Gong dans la Chine moderne. Il a publié plusieurs ouvrages sur le sujet et travail à l’Australian National University College of Asia and the Pacific. L’article en question ici est tiré du Chinese Sociology and Anthropology qui a pour but de promouvoir et développer la compréhension de la société chinoise moderne et fut publié en 1994.
Dans cet article, Penny met en contexte le développement du Qigong depuis le premier évènement marquant de ce qu’il définit comme «la frénésie moderne du Qigong et des évènements paranormaux». Il débute en citant un article paru dans le «Sichuan Daily» le 11 mars 1979 à propos d’un garçon nommé Tang Yu qui semblait pouvoir lire avec ses oreilles. Le même quotidien indique que le jeune garçon d’âge primaire vu avec ses oreilles qu’un camarade avait un paquet de cigarettes «Swan» dans ses poches. L’auteur poursuit en mentionnant que selon les «médias Qigong» avant 1986 on estimait à dix millions le nombre d’adeptes et que la majorité d’entre eux étaient des citadins de toutes classes et fonctions. Les histoires semblables à celle de Tang Yu se multiplièrent au cours des années avec certains disant pouvoir lire avec leurs oreilles, aisselles, plante du pied et même certains pouvaient voir avec des organes internes.
Face à cette frénésie, certains restèrent perplexes dont Zhou Jianren le frère de Lu Xun et Ye Shengtao, éducateur renommé. Ces derniers se sont ouvertement opposé à ce mouvement et Ye publia un article dans le «People’s Daily» critiquant la montée de ces activités paranormales. Dans cette vague de scepticisme, l’institut provincial médical de Sichuan mit sur pied une étude sur la plausibilité de ces phénomènes. Les chercheurs conclurent que l’oreille, étant un organe de l’ouïe, est incapable de distinguer les images.
Malgré cette étude, la prolifération des manifestations des capacités paranormales continua. Ce mouvement avait pris une nouvelle tendance qui utilisait la pensée pour effectuer des choses tel que lever des objets ou écrire sans même lever un crayon. En quelques années, la vague Qigong prit assez d’ampleur que même Ye Jianying fut témoin d’une manifestation ce qui eut pour conséquence de réussir à faire taire les opposants et les forcer à mener une lutte clandestine.
Le début des années 80 est profitable pour le Qigong grâce au scientifique Qian Xuesen qui soutient que le Qigong, les capacités paranormales et la médecine chinoise traditionnelle forment la science de la vie du corps humain. Les résultats de cette découverte seraient que de grandes avancées dans le domaine de la physique en découleraient.
Selon Penny, le Qigong et les pratiques chamaniques utilisent à tort un vocabulaire scientifique pour donner de la crédibilité à leurs théories. Le Qi serait un champ électromagnétique et il serait possible de voir le Qi qu’émet une personne à l’aide de capteurs infrarouges. Il serait aussi possible de changer la structure moléculaire de l’eau pour en faire des fluides cosmiques guérisseurs. En 1986, suite à ce qui semble être une synergie au sein du mouvement, les maîtres sortent des montagnes pour enseigner de nouvelles sortent de Qigong. Les performances deviennent spectaculaires et les effets bienfaiteurs sont presque instantanés. Penny note ici que «les gens commençaient à être impatients et voulaient des résultats rapidement».
Ensuite vient une série d’exemples de faits extraordinaires des maîtres : un vol d’une ville à l’autre, un autre voit au travers de la terre, des halos apparaissent au-dessus des têtes des membres d’un groupe, les manifestations sont maintes et variées. Souvent l’enseignement se résume à charger un montant qui permet d’accélérer le processus de développement du gong de l’élève mais ce dernier est toujours redevable au maître. Yan Xin est le plus connu de ces maîtres charismatiques. Ses techniques permettaient à ses fidèles d’atteindre des états d’esprits transcendantaux. Certainement, la position qu’il fait adopter à ses fidèles y est pour quelque chose, mais il prétend que ses pouvoirs en sont la cause.
Penny avance que Yan Xin profite de la situation dans laquelle se trouve la Chine à cette époque pour devenir le superman chinois. Il incarne la restauration de la confiance en soi d’une nation qui a perdu son héros national et qui se trouve prit pas le tourment des réformes. Les justifications scientifiques donnaient la crédibilité nécessaire au Qigong pour sembler être le salut de la nation. En un sens, il poursuit la tradition du culte de la personnalité que Mao avait instauré. Il soutient la moralité dans une société qui est désillusionné par son gouvernement et utilise cette position pour donner l’impression que le Qigong amènera à la restauration de l’État communiste idéal.
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